Ambiguïté et paradoxe

août 1, 2016

Cette semaine est celle du Masterclass pour les études européennes. Ou plutôt était. Pour une raison quelconque que j’ignore, alors que les problèmes européens deviennent de plus en plus urgents et sérieux, après les conséquences du referendum du ‘Brexit’ et les actions terroristes en cours, les inscriptions insuffisantes nous ont poussés à annuler cette semaine d’étude.

Cependant, nous publierons ce mois-ci quatre extraits (édités) du texte du Masterclass, Europe and the Gospel (L’Europe et l’Evangile), par le professeur Evert Van de Poll, prévus pour être enseignés cette semaine en partenariat avec moi-même. Ce livre est le meilleur que je connaisse à ce niveau, offrant une grande introduction au rôle de l’Evangile dans la formation de l’Europe, et aux défis contemporains tels que l’intégration européenne, les Droits de l’Homme, l’Islam en Europe,  la migration et l’identité. Ce livre est une édition spéciale pour le Masterclass, et ne peut être obtenu que par l’intermédiaire de Schuman Resources.

EVdP : Curieusement, beaucoup de gens à travers le continent reconnaissent qu’ils sont à l’intérieur de l’Europe mais ils se sentent, pensent et agissent comme s’ils étaient en dehors. Pour eux, l’Europe commence là où leur pays se termine. Alors qu’ils vivent, d’un point de vue plus terre-à-terre, en Europe, ils estiment que l’Europe se trouve en dehors de leurs frontières nationales, comme un grand cercle autour d’elles.

Cette ambiguïté est typique pour les Européens. Lorsqu’ils parlent de ‘l’Europe’, ils veulent généralement dire le continent, à l’exclusion de leur propre pays. ‘Les Européens’ sont les habitants des pays voisins qui parlent des langues étrangères et ont d’autres coutumes.

Bien sûr, nous sommes en relation d’affaires avec d’autres Européens. Nous avons des échanges éducationnels. Nous traduisons leurs livres. Nous passons nos vacances dans leurs pays ; nous aimons découvrir leurs villes historiques, leurs parcs naturels, leurs attractions touristiques, leurs restaurants et leur nourriture. Mais même si, au sein du continent, les contrôles aux frontières ont disparu dans une large mesure, nous traversons toujours une frontière mentale chaque fois que nous quittons notre territoire national. C’est alors que ‘nous allons en Europe’.

Où se tiennent les chrétiens ?

Les chrétiens ne font pas exception à cette tendance de penser que l’Europe est quelque chose en dehors de ‘nous’. Leurs églises (protestantes) ont une portée nationale plutôt qu’européenne. L’Europe, en tant que terre de mission, se trouve en dehors de leur pays.

Mais ceci est une représentation trompeuse de la réalité. Que cela nous plaise ou pas,  l’Europe commence là où nous vivons. Nous en faisons partie. Bien sûr, nous sommes aussi Néerlandais, Français, Allemands, et ainsi de suite, mais en même temps, nous sommes Européens. Ceci est notre continent. Ceci est notre contexte. Voilà où nous sommes appelés à être une lumière.

Communiquer l’Evangile en Europe n’est pas ‘une mission étrangère’ mais une ‘mission locale’. A l’inverse, ce que nous faisons pour l’avancement du Royaume de Dieu, dans notre propre pays, est ‘une mission européenne’.

Ces affirmations vont à l’encontre d’une autre tendance : partout en Europe, les gens remettent en avant les identités nationales, ou les identités régionales, comme dans le cas des Flamands, des Ecossais, des Catalans et d’autres. Un pourcentage croissant de la population est de plus en plus inquiète de la poursuite de l’intégration économique, de la bureaucratie de ‘Bruxelles’, et des idées fédéralistes. Tout cela porte l’étiquette d’‘Europe’ d’une manière péjorative.

Dans les sociétés multiculturelles d’aujourd’hui, la majorité de la population est de plus en plus réceptive aux idées populistes qui misent sur la nation, son héritage culturel, son mode de vie et sa tradition. Tout ceci a à voir avec l’identité. D’une part, il y a un sentiment d’appartenance à l’Europe. D’autre part, les gens s’identifient à leur pays ou leur région, plutôt qu’à l’Europe dans son ensemble.

Qu’en est-il des chrétiens ? Dans quelle mesure partagent-ils ces tendances ? Les mouvements populistes soutiennent souvent leurs idées, avec une revendication des ‘racines chrétiennes’ de l’Europe.

Quelle est notre contribution, en tant que chrétiens, à l’avenir de l’Europe ? Ce sont des questions difficiles auxquelles nous devons répondre.

Nous devrions commencer avec la prise de conscience que nous sommes en Europe, pour le meilleur et pour le pire. L’Europe n’est pas seulement ‘eux’, ce n’est pas seulement ‘nous’, mais c’est ‘eux et nous’. L’Europe commence là où je vis, où je parle ma propre langue, et où je fréquente l’église.

Donc, lorsque nous parlons de l’Europe, nous avons affaire à ‘nous’. Etudier l’Europe est un bon moyen de mettre les affaires locales dans une perspective plus large.

Paradoxe

L’Europe est le plus christianisé de tous les continents. Aucune autre partie du monde n’a été autant exposée au message de la Bible durant une période aussi longue. En même temps, l’Europe est marquée par l’abandon du christianisme, plus que toute autre partie du monde. Elle a donné naissance à une vision du monde sécularisée, l’athéisme, des modes de vie et des idéologies politiques séculiers, à un point tel qu’elle peut être appelée ‘postchrétienne’.

Comment le message, qui était si important dans la construction de l’Europe, peut avoir un impact positif sur les sociétés sécularisées et multiculturelles d’aujourd’hui ?

Cette relation paradoxale d’amour-haine entre nos cultures et nos sociétés, d’un côté, et la religion chrétienne, de l’autre, est réellement une clé pour comprendre notre continent.

(c) Evert Van de Poll, Europe and the Gospel


À la semaine prochaine,

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