Le week-end dernier, c’était Pâques, encore une fois – du moins dans l’Europe orthodoxe et dans d’autres Eglises orientales. Et les Orthodoxes savent vraiment comment célébrer Pâques en grand style.
En Roumanie, la semaine dernière, je suis passé devant la Cathédrale patriarcale de Bucarest après avoir discuté de la logistique au Palais patriarcal où se tiendra la Célébration de la Journée de l’Europe la semaine prochaine.
Debout au milieu d’une petite foule, je regardais avec étonnement la sortie de la cathédrale d’une trentaine d’évêques orthodoxes de tout le pays, revêtus de manière resplendissante pour la gloire de Pâques ! (Quelque part, j’ai eu l’impression qu’ils avaient tous dû faire leurs achats au même endroit.)
Les Européens occidentaux sont surpris d’apprendre le dynamisme de la foi des Roumains, quarante-quatre pour cent d’entre eux priant quotidiennement, le chiffre le plus élevé de l’Union européenne. La moitié de la population se rend au moins une fois par mois à l’église, un chiffre dépassé seulement par les Polonais. Trois Roumains sur quatre estiment que leur foi chrétienne est importante pour l’identité nationale. Les Européens de l’Est, bien qu’ils aient été sous le communisme pendant au moins quatre décennies, n’ont pas suivi le même chemin que le grand nombre d’Européens occidentaux qui, dans les années soixante, ont abandonné l’église dans laquelle ils avaient grandi, de manière ‘étouffante’.
Sur le trajet de l’aéroport, aux premières heures de vendredi matin, mon chauffeur de taxi, un jeune père, parlait avec naturel de l’importance de la religion et de la foi en Dieu et en Jésus-Christ. Il me disait que dès qu’il ferait jour, le trafic serait pare-choc contre pare-choc car tout le monde quitterait la ville pour célébrer Pâques avec la famille élargie. Samedi soir, vers 23 heures, tout le monde se rendra à l’église pour assister à la messe de Pâques. La circulation sera paralysée par la mise en place, au bord de la route, de paniers de nourriture avec agneau, gâteaux, vin pour le repas de Pâques, en attendant que le prêtre passe et bénisse la nourriture. A l’intérieur de l’église, ils allumeront tous des bougies à partir des cierges de l’église pour symboliser la Résurrection de Jésus.
Quelqu’un ramènera la Lumière Sainte à la maison, où, à son arrivée, ils feront une croix sur la poutre en utilisant la fumée de la bougie. Traditionnellement,c’est pour protéger la maison du mal. La famille déguste ensuite un pain spécial appelé ‘Pasca’, mangé seulement à Pâques, fait de blé fin et orné d’une croix. Un plat d’agneau de Pâques suivra, chose que les Roumains ne mangent pas souvent.
Impérialiste
Au sein de l’Union européenne, les attitudes à l’égard de l’église et de la religion sont très diverses. Trop souvent, cependant, les Occidentaux supposent que tous les Européens ont vécu les changements sociaux qu’a connus l’Occident au cours des années soixante. Les changements radicaux dans les conceptions des relations sexuelles, de la famille et du mariage sont supposés s’être produits dans toute l’Europe, et les nouvelles ‘valeurs’ émergentessont supposées être des valeurs ‘européennes’. Ce qui implique que beaucoup de Roumains ne sont pas ‘Européens’.
D’où la nécessité d’un dialogue, d’une écoute dans les deux sens, nord et sud, est et ouest, comme nous le ferons lors du prochain forum. L’expansion de l’Union européenne vers l’Est n’a pas été accompagnée d’une expansion de la conscience occidentale à l’Est. Les Occidentaux sont trop souvent perçus comme étant arrogants et impérialistes envers les Orientaux qui n’acceptent pas automatiquement le ‘nouveau’ comme étant meilleur.
Prenez la question de la date de Pâques, par exemple. Cette année, les Occidentaux ont célébré cette fête une semaine plus tôt que les Eglises orthodoxes et orientales. Quel Occidental pourrait expliquer pourquoi ? Les Orientaux le savent très bien. Cela est lié à l’histoire, à laquelle nous, les pays occidentaux, ne faisons pas vraiment attention. Nous ne sommes pas vraiment très intéressés par le passé que par le fait de commencer par une table rase pour façonner notre propre avenir. Cependant, nous comprenons mal à quel point notre passé a déjà façonné qui nous sommes et pourquoi nous faisons les choses d’une certaine manière.
Deux calendriers
En bref, donc : lors du Concile de Nicée, en 325 après J.C., les dirigeants de tout le monde alors chrétien se sont mis d’accord sur une formule pour célébrer Pâques à la même date : le premier dimanche après la première pleine lune suivant l’équinoxe du printemps (21 mars) ; mais toujours après la Pâque juive, commeJésus et ses disciples avaient célébré la Pâque la nuit précédant sa crucifixion.
Cependant, le calendrier julien, qui avait été utilisé depuis 45 avant J.C., était un calendrier solaire. L’Eglise catholique adopta le calendrier lunaire grégorien, en 1582, afin de compenser la perte de jours accumulée au cours d’une longue période. Depuis lors, la plupart des pays ont emboîté le pas, mais les Eglises orientales se ont respecté la formule du Concile de Nicée, selon laquelle Pâques tombe entre le 4 avril et le 8 mai. Pour les Catholiques, et pour l’Occident avec eux, Pâques se situe entre le 22 mars et le 25 avril. Parfois les deux Pâques tombent aux mêmes dates, comme en 2010, 2011, 2014 et 2017. Mais cela ne se reproduira plus avant 2034 !
Ce qui ajoute au défi de l’unité dans la diversité, un défi qui exige dialogue et écoute !
À la semaine prochaine,