Nous etions surpris en entrant hier dans la cathédrale Saint-Denis, dans le nord de Paris. Après un week-end de dialogue avec les couples missionnaires travaillant parmi les Parisiens séculiers, sans église, nous nous attendions à découvrir le stéréotype du Christianisme actuel : une énorme cathédrale vide, avec quelques vieilles dames priant devant l’autel.
Pour compléter notre Heritage Forum de ce week-end, dans la capitale française, un groupe d’entre nous décida de visiter la première structure gothique du monde, espérant observer, à l’intérieur, les caractéristiques architecturales et les tombes royales, avant le début de la messe du dimanche matin avec ses quelques fidèles. À l’approche de l’imposante entrée occidentale, les vendeurs de rameaux nous rappelèrent ce jour spécial du calendrier de l’église : le dimanche des Rameaux. Les visites officielles ne commençant pas avant midi, nous avons dûment acheté quelques camouflages avant de passer le portail. En entrant dans le sanctuaire même, nous vîmes que la messe était déjà en cours. Le bâtiment entier était rempli, jusque dans les allées. Les gens se tenaient debout partout, jusqu’à l’arrière de la nef. A l’avant, des voix lisaient les écrits de la Passion, accompagnés à l’orgue. Les réponses liturgiques engageaient dans l’histoire toute l’assemblée qui, avec respect et attention, se focalisait sur la procédure.
Nouveaux visages
Mais ce qui fut le plus saisissant pour nous était que l’écrasante majorité de l’assemblée était noire, avec seulement une petite poignée de visages blancs.
Le titre du livre de Philip Jenkins, The New Faces of Christianity (2008), me vint à l’esprit alors que je commençais à ajuster ma compréhension de l’église française actuelle. Le précédent livre révolutionnaire de Jenkins, The Next Christendom (2002), mit en évidence le déplacement du centre de gravité du Christianisme vers le sud, de telle manière que l’Afrique devenait la terre des plus grandes populations chrétiennes du monde.
Dans son New Faces, Jenkins explique pourquoi beaucoup de chrétiens de l’hémisphère sud s’identifient tant avec le monde dépeint dans le Nouveau Testament : un monde agricole marqué par la famine et les fléaux, la pauvreté et l’exil, où la croyance aux esprits et la sorcellerie étaient monnaie courante et où la persécution sévissait, comme aujourd’hui au Nigéria et au Soudan. La Bible leur parlait avec une authenticité perdue par la plupart dans le Nord industrialisé. Déjà conscient de la contribution des immigrés dans le renouvellement de la population des églises évangéliques en Europe, de l’Espagne à la Suède, j’étais maintenant témoin de la version catholique de cette revitalisation via l’émigration des anciennes colonies. Ce que nous voyions devant nos yeux était une évidence partielle qu’approximativement la moitié des immigrants, dans l’Union européenne, étaient des membres pratiquants de l’église.
Nouveaux défis
Alors que j’observais la scène devant moi, les grands piliers minces forçant mon regard vers le haut, en direction des grands vitraux colorés pointus et des plafonds voûtés au-dessus, je réfléchissais aux siècles d’Histoire dont ce bâtiment fut témoin : les saints et les dynasties royales représentées par les effigies de pierre situées dans le transept, en commençant par le premier évêque-martyr, Saint-Denis lui-même ; la Révolution française qui détruisit les vitraux originaux et marqua le style architectural initié ici et qui se répandit dans le monde comme ‘gothique’ et barbare ; l’impact de la modernité du siècle dernier et le déclin des assemblées ; et maintenant cette vague de Christianisme d’immigrants.
Cependant, comme l’un de notre groupe l’observa, alors que nous pourrions nous réjouir de ce fruit du succès du mouvement missionnaire en Afrique, au cours du siècle dernier, la réalité est que ces églises immigrantes sont considérées comme étrangères par les Français, qui soit les méprisent, soit les craignent. Deux défis majeurs restent. D’abord, comment pourrions-nous préparer ces croyants immigrants et leurs enfants à faire face à l’assaut inévitable de la modernité ? Ensuite, comment pourrions-nous trouver de nouvelles façons, non-traditionnelles, d’atteindre les Européens sécularisés et insensibles, tels que les Parisiens, et ne pas simplement se focaliser sur les secteurs les plus sensibles ?
Nous nous étions réunis à Paris afin de partager nos histoires et nos parcours, et redécouvrir la main de Dieu dans l’Histoire européenne. Nous rentrions maintenant au pays, encouragés et nous rappelant comment l’Esprit de Dieu avait renouvelé son Eglise, à plusieurs reprises, à travers des minorités fidèles, mais aussi avec le défi de trouver de nouvelles façons d’apporter le message de Pâques à une Europe sécularisée.
À la semaine prochaine,