Dimanche dernier, de spectaculaires feux d’artifice ont accueilli la Nouvelle Année dans le monde entier, depuis la Sky Tower d’Auckland jusqu’au Big Ben de Londres, à l’origine une tradition censée chasser les démons.
Si seulement chasser des démons était aussi facile.
En effet, les prédictions de la Nouvelle Année incluent le retour des vieux démons qui ont hanté le passé de l’Europe, des esprits peu familiers aux générations d’après-guerre insouciantes, pour qui la paix et la prospérité ont été la norme attendue. La guerre – du moins dans notre arrière-cour – était devenue impensable, dans l’accomplissement du rêve des pères fondateurs du projet européen. Ce projet était censé chasser une fois pour toutes les fantômes du nationalisme exclusif, du racisme, de l’antisémitisme et de la démagogie induisant la peur. Leur vision, comme l’exprima Robert Schuman, était celle d’une Europe qui deviendrait une communauté de peuples, profondément enracinée dans les valeurs chrétiennes de base de la paix, de la liberté, de la dignité humaine et de la solidarité.
Ce rêve culmina, il y a un quart de siècle, avec la chute du communisme, libérant l’Europe centrale et celle de l’Est de l’emprise de Moscou. C’étaient des journées passionnantes, grisantes, lorsque des valeurs telles que la fraternité, le bien commun, l’égalité et les frontières ouvertes furent célébrées. Certains parlaient même de la ‘fin de l’histoire’ et du triomphe final de la démocratie libérale occidentale.
Nuit d’euphorie
Il y a quelques semaines, à Tallinn (Estonie), je rappelais ces jours au Parlement européen de la jeunesse chrétienne avec un public d’Européens trop jeune pour se souvenir de cette nuit d’euphorie, lorsque le Mur de Berlin fut forcé ; ou de la Révolution chantante, lorsque les grands festivals de musique baltes devinrent des opportunités de se rebeller contre la tyrannie communiste ; ou lorsque leurs parents et grands-parents se sont donné la main dans la grande Chaine humaine balte à travers trois nations ; ou lorsque les Lituaniens replantèrent des croix sur un ancien site sacré, la Colline des Croix, après que les autorités les eurent démolies.
Ils n’avaient jamais goûté à l’excitation du mouvement syndical Solidarność en Pologne, dirigé par Lech Walesa et d’autres, encouragé par le Pape Jean-Paul II ; ou les rassemblements Prière et Paix à Leipzig, où plusieurs milliers protestèrent dans le chant, de manière pacifique. Ils ne savaient rien du piquenique paneuropéen à la frontière entre l’Hongrie et l’Autriche, en août 1989, avec la présence de 10.000 personnes attendant le jour de l’ouverture des frontières, et lorsque des centaines franchirent la frontière vers la liberté, mettant les gardes-frontières à l’épreuve. Ils n’avaient que vaguement entendu parler de la Révolution de velours à Prague, qui catapulta le dramaturge Vaclav Havel de la prison au palais présidentiel.
Maintenant, presque une génération complète plus tard, mon auditoire pouvait se souvenir de l’espoir et des attentes suscitées lorsque leurs nations ont rejoint l’Union européenne dans la dernière décennie. Mais les promesses de sécurité et de bien-être collectifs ont aujourd’hui cédé la place à un sentiment général d’attentes non comblées, de déception et de désillusion, de colère et de frustration.
Car avec la fin de l’année qui nous a apporté le Brexit et Trump, Alep et Berlin, une ère qui a commencé avec la fondation des Nations Unies, de l’OTAN et de ce qui est devenu l’Union européenne, semblait également se terminer. Je me suis excusé auprès de me jeunes auditeurs du fait que ma génération leur léguait une Europe craintive pour l’avenir, incertaine de demain, une Europe aux prises avec de graves menaces de l’intérieur et de l’extérieur, une Europe à la croisée des chemins.
Je leur citais les mots du Premier ministre slovaque prononcés quelques jours auparavant : « Seul un fou voudrait retourner aux siècles de l’évolution des Droits de l’Homme et de la société civile. Pourtant aujourd’hui… il y a un danger clair et présent que beaucoup d’entre nous pensaient ne jamais voir se réincarner à nouveau. C’est la montée du nationalisme, de l’extrémisme et du racisme.… Nous avons soudainement le sentiment que l’histoire désagréable de l’Europe est de retour. »
Déjà en 1992, Sir Fred Catherwood, ancien vice-président du Parlement européen, avait mis en garde que, même si nous avions nettoyé notre maison européenne du fascisme et du communisme, nous avions aussi désormais une Europe plus vide que jamais de la foi chrétienne. L’Europe était une maison nettoyée, prête pour l’arrivée de sept démons pires que les premiers.
Nouvelles réalités
Alors que cette nouvelle année commence, nous devons nous réveiller face aux nouvelles réalités et aux nouveaux défis à venir. Plus que jamais, comme je le rappelais à mon jeune public, l’Europe a besoin de faiseurs de paix, de constructeurs de ponts, de porteurs d’espoir et de faiseurs d’Histoire. Nous devons comprendre les changements qui se produisent sous nos yeux. Nous avons besoin d’être encouragés par des histoires sur la façon dont des minorités fidèles et créatives peuvent faire une différence.
À cette fin, nous vous proposons, cette année, plusieurs opportunités de vous équiper :
- le Cours sur les études européennes, à Bruxelles, chaque quatrième samedi du mois, de janvier à juin, présentant des perspectives bibliques sur le passé, le présent et l’avenir de l’Europe ;
- le Forum sur l’état de l’Europe, à La Valette (Malte), les 7 et 8 mai prochains, sur l’espoir, la guérison et l’hospitalité ; et
- le Tour de l’héritage continental, du 1er au 16 juillet, sur le 500ème anniversaire de la Réforme de Luther, en visitant 40 lieux, dont le Château de Wartburg, Wittenberg, Zürich, Genève, Bâle et Strasbourg.
Car la lumière de Jésus, brillant dans les ténèbres, est bien plus efficace que n’importe quel feu d’artifice.
À la semaine prochaine,