Il est né, il y a 1700 ans cette année, en Hongrie, et il a laissé un héritage inégalé à travers l’Europe. Cinq mille monuments le commémorent en Italie, où il a vécu une grande partie de son enfance, en tant que fils d’un officier militaire romain. Quatorze cathédrales européennes portent son nom. Près d’un quart de million de Français portent son prénom comme nom de famille. Il a aussi donné son nom à 225 municipalités en France et quelques 37.000 églises dans le monde entier. Il est considéré comme le père du monachisme occidental, fondateur de quelques-uns des premiers monastères de l’Occident.
Bien que dérivant de Mars – le dieu romain de la guerre – son nom est devenu synonyme de miséricorde et de compassion à travers ses actions. Et il est à jamais lié à la ville française de Tours, où il a été fait évêque, par le peuple, contre sa volonté.
Car Martin de Tours continue à inspirer et influencer les Européens contemporains à réfléchir et agir sur les enseignements de Jésus. Cette année de commémoration attire des pèlerins à Tours et dans la basilique où il est enterré, comme j’ai pu le découvrir lors d’un voyage en France, la semaine dernière.
Né vers l’an 316, très peu de temps après la conversion de l’Empereur Constantin, Martin voulait servir Dieu à l’âge précoce de dix ans, comme nous pouvons l’apprendre par son biographe, Sulpice-Sévère (c. 363 – c. 425). Mais son père n’éprouvait aucune sympathie pour les aspirations spirituelles de son fils et Martin fut forcé de rejoindre l’armée et prêter le serment militaire.
Lèpre
En tant que jeune soldat de 18 ans, Martin était affecté à Amiens, en Gaule, au nord de Paris, lorsqu’il rencontra un mendiant nu aux portes de la ville. Sévère écrit : Que devait-il faire ? Il n’avait rien, excepté la cape avec laquelle il était vêtu, car il avait déjà (donné) le reste de ses vêtements. Prenant donc son épée dont il était ceint, il divisa sa cape en deux parties égales, et donna une partie à l’homme pauvre, tandis qu’il se rhabilla avec le reste. À la vue de ceci, certains passants rirent, car il était désormais un objet inesthétique, et se distingua comme étant partiellement dévêtu. Cependant, beaucoup, parmi ceux qui avaient une compréhension plus solide, gémirent profondément car ils n’avaient eux-mêmes rien fait de similaire. Ils l’ont particulièrement ressenti parce que, possédant plus que Martin, ils auraient pu vêtir le pauvre homme sans se réduire eux-mêmes à la nudité.
Cet événement allait devenir légendaire après que le ministère et la renommée de Martin commença à se répandre, grâce au rapport de Sévère. Finalement, la demi cape qu’il garda fut conservée en tant que relique comme ‘la Cape de Saint-Martin’ dans l’oratoire de la ligne des rois francs connus comme la Maison capétienne, en commençant par Hugues Capet (c.940-996). Le petit abri construit pour abriter la cape devint connu comme étant une Capel ou chapelle. Le prêtre qui accompagnait la cape, portée dans les batailles avec les soldats, comme une relique garantissant la bénédiction de Saint-Martin sur l’issue du combat, était appelé capellan, ou chapelain.
Le jeune soldat Martin avait cependant une grande difficulté à concilier sa foi chrétienne avec le service militaire et expliqua à son commandant, à la veille d’une bataille contre des barbares près de Worms en Allemagne : « Je suis le soldat de Christ, il ne m’est pas permis de me battre. » Accusé de lâcheté, Martin se porta volontaire pour se tenir sans arme, sur la ligne de front, le jour suivant : « Au nom du Seigneur Jésus, protégé par le signe de la croix et non par un bouclier ou un casque, je pénètrerai en sécurité dans les rangs de l’ennemi. »
A l’aube, le lendemain, l’ennemi se rendit avant le début du combat et Martin, justifié, fut déchargé du service. Martin se rendit à Poitiers, en Gaule, pour y devenir un disciple de Saint-Hilaire. Au milieu de la trentaine, Martin rassembla un certain nombre de moines autour de lui, pour finalement former le noyau d’une communauté monastique qui, plus tard, se développa pour devenir la célèbre Abbaye bénédictine de Ligugé.
Guérison
Le passé militaire de Martin l’aida à voir le potentiel stratégique d’une telle communauté pour soutenir les campagnes d’évangélisation. Il se mit lui-même à évangéliser les habitants païens de la Gaule centrale et occidentale. Beaucoup de légendes subsistent au sujet des exploits du saint. Sévère raconte des miracles de guérison à travers le ministère de Martin et même la résurrection d’entre les morts de trois individus différents. L’un d’entre eux expliqua personnellement au biographe comment, après avoir quitté son corps, un tribunal céleste lui avait dit qu’il retournerait à la vie terrestre, grâce aux prières de Martin.
Malgré qu’il devint évêque de Tours, il continua à vivre dans une cellule, en dehors de la ville, alors qu’il accomplissait ses nouvelles tâches avec simplicité et ferveur évangélique. De nouveau, il fut bientôt rejoint par d’autres ermites, et une autre communauté monastique émergea, laquelle existe encore aujourd’hui : Marmoutier.
Martin mourut, âgé de plus de quatre-vingts ans, aux environs de l’an 397, et devint un des saints les plus révérés de l’histoire de France. Depuis l’Armistice de 1918, marquant la fin de la Grande Guerre, le 11 novembre, jour de sa fête, il a été considéré comme le saint patron officieux de cette nation très séculière.
À la semaine prochaine,