Le coup de tonnerre de Wittenberg

juillet 3, 2017

Si le jeune Martin Luther n’avait pas été pris dans un gros orage d’été, durant la première semaine de juillet 1505, il n’y aurait sans doute  jamais eu de Réforme luthérienne.

Car, alors qu’il retournait, le long d’une route de campagne, à son université pour ses études de droit à Erfurt, un grand coup de tonnerre éclata près de lui. Terrifié, le jeune homme de 21 ans implora désespérément Saint-Anne, la mère de Marie, de le laisser vivre, en promettant d’entrer dans un monastère et de devenir moine.

Revenu dans ses classes, certains de ses camarades étudiants l’exhortèrent à ne pas prendre son vœu au sérieux. D’autres lui dirent qu’il le devrait. Comme nous le savons tous, Luther respecta son vœu et devint un moine augustinien, totalement contre la volonté de son père.

Douze ans plus tard, en tant que moine érudit, Luther lui-même éclata dans le paysage européen, tel un coup de tonnerre, terrifiant les échelons les plus élevés de l’Eglise catholique romaine avec ses 95 thèses contestant les méthodes de collecte de fonds de l’église, par la vente des indulgences.

La date du 31 octobre 1517 est admise comme étant le début de la Réforme luthérienne, et est encore généralement observée comme le Jour de la Réforme. Dans l’imagination populaire, c’est le jour où Luther cloua ses célèbres thèses sur la porte de l’Eglise du Château, dans la ville de Wittenberg où désormais, il enseignait à l’université.

Les savants doutent cependant que Luther ait jamais affiché ses arguments de cette manière-là. Il n’a jamais rien écrit lui-même au sujet d’un tel incident. Le premier présumé récit n’apparût qu’après la mort de Luther, provenant de son collègue et ami Philippe Melanchthon qui n’a pas été appelé à Wittenberg en tant que professeur avant 1518. Ce qui semble certain, c’est que le 31 octobre 1517, Luther écrivit une lettre respectueuse à ses supérieurs, dénonçant la vente des indulgences. Il inclut les 95 thèses pour servir de base à des discussions ultérieures.

Découverte

Cette date a été une étape significative de ce qui évolua plus tard vers la Réforme ; tout comme la découverte personnelle de Luther de la vérité théologique de la justification par la foi, quelques années auparavant. Pourtant, la Réforme ne s’est pas tout à coup produite partout. Deux générations entières passèrent avant qu’elle ne prenne racine aux Pays-Bas, par exemple.

Dire donc que la Réforme ‘débuta’ le 31 octobre 1517 est un peu artificiel. Néanmoins, c’est une date aussi utile que n’importe laquelle pour tenir les commémorations de ce qui devint une influence majeure dans l’histoire européenne à partir du 16ème siècle.

Le Tour continental de l’héritage de cette année qui a débuté ce week-end, a donc lieu durant l’officiel ‘500ème anniversaire de la Réforme’, ou plutôt, du 500ème anniversaire d’une évolution significative qui finit par devenir le mouvement de la Réforme, changeant l’église et la société en Europe septentrionale.

Ce mercredi, alors que nous nous approcherons d’Erfurt dans nos deux camionnettes, les prévisions météorologiques annoncent de la pluie. Qui sait ? Cela pourrait tourner en orages d’été, comme c’était le cas, lors de tours précédents, lorsque nous nous approchions de la ville où Luther entra dans le monastère augustinien. Visiter l’église du monastère, où le novice Luther se tenait prosterné devant l’autel, la cellule où il luttait chaque nuit avec le diable, et ensuite regarder le film de Joseph Fiennes (2003) décrivant le combat du moine pour la vérité, rend l’histoire concrètement vivante pour les participants du tour.

Le jour suivant, nous serons dans une Wittenberg très animée, pour retracer les pas du réformateur à travers la ville, depuis l’Eglise du Château, d’un côté, jusqu’à la Maison de Luther, de l’autre, où lui et Catherine de Bore modelèrent une vie de famille dans une nation sans aucun exemple précédent de dirigeants spirituels mariés.

Dialogue

Lundi prochain, nous reprendrons le fil à Augsbourg où Luther avait été convoqué, pour la première fois, pour rendre compte au Cardinal Cajetan. Nous visiterons l’Eglise Sainte-Anne où a séjourné Luther et où plus récemment, en 1999, le dialogue entre le Vatican et l’Eglise luthérienne a produit la Déclaration conjointe sur la Doctrine de Justification.

Cette déclaration révéla un changement de cœur majeur de la part de l’Eglise catholique. Sur base de cette déclaration, le Pape Benoît XVI qui – en tant que Cardinal Ratzinger – a été personnellement impliqué dans le dialogue avec les luthériens, déclara sur la Place Saint-Pierre, en 2006, que Luther avait raison au sujet de la doctrine de la justification.

Ce qui nous ramène de manière intéressante à la première thèse de Luther : « En disant : Faites pénitence (Matthieu 4:17), notre Maître et Seigneur Jésus-Christ a voulu que la vie entière des fidèles fût une pénitence. »

L’enjeu pour Luther était le sens de la repentance (pénitence). Est-ce que la phrase latine Poenitentiam agite signifie ‘faire pénitence’ comme une action pénitentielle externe, ou ‘se repentir’ comme un changement de cœur interne ? La repentance, concluait-il, signifie un changement de cœur, un style de vie de cœur changé.

Cette vision, inspirée par la lecture de la traduction latine d’Erasme, publiée peu de temps auparavant, en 1516, déclencha une dispute de 500 ans qui a été réglée, par les deux parties, en adoptant une attitude de changement de cœur.

D’autres différences importantes subsistent encore concernant l’ordination des femmes et les sacrements. Mais si nous voulions tous nous inspirer de la première thèse de Luther, en adoptant un style de vie de changement de cœur, cette année de commémoration pourrait être l’une des grandes découvertes mutuelles.


À la semaine prochaine,

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