Le pape François est en train d’écrire l’histoire de l’église. Il est à l’origine d’une innovation radicale dans les relations œcuméniques avec les courants charismatiques/pentecôtistes/évangéliques. En tant que premier pape latino-américain, il rompt avec l’état d’esprit européen qui privilégie la théologie et la doctrine. Au lieu de cela, Il cherche d’abord la relation avec tous ceux qui aiment Jésus et ceux qui sont ouverts au Saint-Esprit.
Ces perspectives furent partagées lors d’un rassemblement informel de dirigeants auquel j’ai assisté à Rome, la semaine dernière, comprenant ceux de courants tant catholiques que charismatiques non-catholiques : Dr. Kevin et Dorothy Ranaghan, pionniers du mouvement charismatique catholique qui débuta, il y aura 50 ans l’an prochain ; le théologien catholique Peter Hocken, historien du mouvement charismatique et ami de longue date de Jeunesse en Mission ; ainsi que des amis personnels du pape et des dirigeants de ce qu’on appelle les nouvelles églises charismatiques.
La doctrine, bien qu’étant essentielle et nécessaire, est une activité de second rang, éclipsée par les relations, selon le pape. S’inspirant de la relation intra-trinitaire, il explique que la Trinité n’est pas d’abord une doctrine, mais est la réalité ultime de Dieu. Tout comme la réalité précède la description, de la même manière la relation précède la théologie. Alors que les évangéliques cherchent des exemples bibliques pour expliquer ce qui est nouveau et peu familier, et que les catholiques recherchent des précédents dans la tradition de l’église, le pape François innove, en insistant sur la créativité, la nouveauté, et même les surprises du Saint-Esprit.
Dans des discours récents aux dirigeants catholiques charismatiques, nous avons entendu François donner plus d’attention au Saint-Esprit que n’importe lequel de ses prédécesseurs. Misant sur la reconnaissance du pape Benoît XVI, que l’âge confessionnel a commis une erreur en commençant par la doctrine et en oubliant l’expérience, François considère le mouvement de l’Esprit comme un courant de grâce destinée à toute l’église catholique romaine et à l’ensemble du Corps de Christ.
Marcher ensemble
François ne considère pas l’unité comme signifiant un retour d’autres confessions à Rome, mais plutôt une conformité de toutes les églises à Jésus. De façon unique pour l’Evêque de Rome, il ne suppose pas que son église est la plus proche de la vérité. En fait, il considère l’église catholique comme la principale pierre d’achoppement à l’unité de l’église, selon un leader senior franciscain présent. Il appelle, dès lors, l’Eglise entière à une ‘conversion pastorale et missionnaire’ et à une réforme continue. Ceci est moins le travail des théologiens que de ceux qui prient. On a entendu le pape dire que si l’unité dépendait des théologiens, le Seigneur reviendrait sans doute d’abord !
Au contraire, il parle d’un ‘voyage de synodalité’ (du mot grec sunodos, de sun- ‘ensemble’ + hodos ‘chemin’). Un tel voyage signifie marcher ensemble, avec les croyants catholiques et ceux des autres églises, s’écouter mutuellement, apprendre les uns des autres, prier ensemble, servir ensemble, être ouvert au Saint-Esprit ensemble, et prendre la responsabilité ensemble afin de proclamer l’Evangile. Ceci est sans doute plus facile à exprimer avec des mots, reconnaissait François, que de mettre en pratique.
‘Le voyage de synodalité est le voyage que Dieu veut de son Eglise dans le troisième millénaire,’ affirme le pape argentin. ‘Une église synodale est une église qui écoute, consciente qu’écouter est plus qu’entendre. C’est une écoute réciproque dans laquelle chacun a quelque chose à apprendre.’
Frère et ami
Certains de ceux qui avaient rendu visite au pape, alors qu’il était encore le cardinal Jorge Bergoglio à Buenos Aires, parlaient de la chaleur avec laquelle d’autres pasteurs de la ville parlaient de lui. Un pasteur luthérien s’était enthousiasmé en disant : ‘Nous l’aimons ; il s’agenouille toujours et demande la prière.’ Je me suis rappelé de mon collègue de JEM, Alejandro Rodriguez, racontant comment, lorsque le cardinal rencontra pour la première fois les Jemmiens dans leur centre de prière, dans le même bâtiment que son propre appartement, ils avaient commencé à discuter avec lui au sujet de la doctrine, mais le cardinal les avait désarmés en leur demandant simplement leurs prières.
Le pasteur pentecôtiste italien Giovanni Traettino témoigna de sa propre amitié personnelle avec le pape, qui causa de grands remous parmi les catholiques et les pentecôtistes, lorsqu’il rendit visite à l’église et à la maison du pasteur il y a presque deux ans. Le principal élément unificateur pour les évangéliques en Italie, disait-il, était l’hostilité envers l’église catholique romaine. Pourtant, François était venu comme un frère, un ami et un pasteur. Le pape parla d’une rencontre avec ses frères, et non pas ‘de frères séparés’, comme cela fut exprimé dans le passé, mais ‘de frères retrouvés’. C’était visiter des amis, non comme une formalité, et n’avait rien à voir avec le relativisme ou le compromis. En tant que pasteur de tous les catholiques, il voulait demander pardon, au nom de ceux qui appelaient les pentecôtistes ‘des fous’. Le pape parla de créer un pont vers ‘l’archipel pentecôtiste’, à partir duquel commença en premier lieu le mouvement du Saint-Esprit, dans l’église catholique, il y a un demi-siècle.
Dans une lettre récente aux dirigeants pentecôtistes, le pape écrivit au sujet ‘d’un voyage précieux à partir duquel il n’y a pas de retour en arrière.’ C’était, écrivit-il, un nouveau jour dans les relations entre pentecôtistes, évangéliques et catholiques, un tournant dans l’Histoire.
À la semaine prochaine,