Parfois, nous avons besoin d’être choqués dans notre zone de confort. Jésus pouvait se rendre compte que l’expert en droit auto-suffisant qui le questionnait avait besoin d’une thérapie de choc.
Après avoir répondu correctement à la question de Jésus, à propos de ce qui était écrit dans la Loi concernant l’héritage de la vie éternelle – ‘aime Dieu et ton prochain’ – l’homme répondit : “Et qui est mon prochain ?”
Luc nous dit que la question était posée dans un état d’autojustification. Après tout, il doit y avoir des limites quant à ceux que nous devons aimer, n’est-ce-pas ?
Le caractère familier avec la parabole du Bon Samaritain peut nous faire oublier l’impact provocant qu’il a eu lors de son premier récit. Nous oublions que pour un Juif, l’adjectif ‘bon’ ne rimait pas avec ‘samaritain’. C’était un oxymoron. Car pendant plus de mille ans, les Juifs et les Samaritains s’étaient détestés. Les Juifs, qui tenaient leur nom du royaume méridional de Juda, ont été des rivaux politiques avec le royaume septentrional, établi par les dix tribus rebelles, avec leur capitale en Samarie. Les Juifs méprisaient les Samaritains et ces derniers leur retournaient le compliment. Juste avant cette histoire, Luc raconte comment Jacques et Jean avaient demandé si Jésus voulait qu’ils appellent le feu du ciel pour détruire un village samaritain qui ne les avait pas accueillis.
Et donc maintenant, en réponse à la question : ‘Qui est mon prochain ?’, Jésus commence par raconter cette histoire. Nous connaissons un peu le passage de ce pauvre homme qui tombe dans les mains de trafiquants d’êtres humains, ou peut-être était-ce des terroristes, ou des gouvernements tyranniques…? Et nous savons ce qui vient ensuite, à propos des professionnels religieux – et, oui, des experts en droit – qui ont dû se dépêcher dans leurs réunions bien programmées, leurs rendez-vous toujours si importants…
Puis, vient cet homme noir – du moins, c’est comme cela que l’artiste Dinah Roe Kendall dépeint l’histoire dans la peinture ci-dessus, afin de choquer ses observateurs racistes. Ou bien était-il bisexuel, ou – à Dieu ne plaise – un musulman ?
Offense
Si ceci vous choque, vous êtes en bonne compagnie. Le public de Jésus s’offensa en grande partie de ce qu’il disait. En particulier l’institution religieuse. Et c’était la raison pour laquelle ils voulaient le tuer.
Car dans ce cas-ci, Jésus dit que, dans le royaume de Dieu, parfois les justes sont injustes et les mauvais sont bons. Quelques chapitres plus loin, Jésus choque à nouveau en faisant du lépreux samaritain un héros : « ne s’est-il trouvé que cet étranger pour revenir et donner gloire à Dieu ? » (Luc 17:18)
Jésus n’a pas seulement renversé les tables dans le temple. Il retournait constamment les situations dans ses histoires. Ici, le Samaritain, l’étranger, est celui qui prend pitié de la victime.
Aujourd’hui, nous entendons toutes sortes d’arguments expliquant pourquoi nous ne devrions pas aider les réfugiés affluant dans nos pays. Et que dirait donc Jésus ?
Ce week-end, ma femme et moi-même avons rencontré des collègues et amis de JEM, lors d’une retraite annuelle pour la communion et l’encouragement. Inévitablement, nous avons discuté de la situation actuelle des réfugiés. Ma femme raconta comment son amie serbe, Ksenija, avait regardé avec stupeur une longue file de réfugiés syriens passant devant la fenêtre de sa cuisine. Son mari, un pasteur, a dit : “tu sais, nous avons prié pendant des années pour les gens de la fenêtre 10/40, et les voilà désormais qui viennent vers nous !”
Bruce, qui a passé les 40 dernières années à travailler dans l’Europe catholique, raconta qu’une paroisse, en Autriche, a accepté la responsabilité de 1400 réfugiés. Roger et Ursula, qui nous rejoignent habituellement lors de cette retraite, étaient absents après nous avoir écrit pour dire qu’ils préparaient le centre dont ils sont responsables, en Suisse, pour recevoir des réfugiés. Il y a trente ans, ils avaient reçu des réfugiés tamils, dont certains sont devenus disciples de Jésus et à leur tour, sont repartis pour servir auprès de leur propre peuple.
Moins que rien
Ensuite, Al partagea son histoire remarquable, issu d’une famille de réfugiés, fuyant le règne de terreur de Staline. Ses parents étaient ukrainiens et avaient fui, à travers la Sibérie, vers la Chine, où naquit Al peu de temps après la guerre. Alors que Mao Tsé-toung avait gagné le contrôle de la Chine, le destin de la communauté de réfugiés russo-ukrainienne était dans la balance. Dans le cadre de l’accord de Yalta, Roosevelt et Churchill avaient accepté les demandes de Staline que tous les réfugiés russes soient renvoyés en Russie (voués à une mort certaine).
Aucun pays n’était préparé à recevoir cette bande de moins que rien. Jusqu’à ce que le président des Philippines eut pitié d’eux.
Ils purent ainsi voyager vers une île qui avait été une base de l’armée américaine. Al passa deux années là-bas en tant qu’enfant en bas âge avec sa famille, avant d’être transporté, plus tard, sur un contre-torpilleur américain afin de démarrer une nouvelle vie à San Francisco. Pendant plus de quarante ans, Al et sa femme Carolyn ont été engagés dans une mission étonnamment fructueuse auprès des peuples de l’Union soviétique, partout où ils se trouvent dans le monde – un réfugié devenu missionnaire.
Jésus n’a jamais directement répondu à la question de l’expert en droit : « Qui est mon prochain ? »
Il demanda : « À ton avis, lequel des trois s’est montré le prochain…? »
L’expert répondit : « Celui qui a eu pitié de lui »
Jésus nous dit : « Allez et faites de même. »
À la semaine prochaine,